Acouphene: traitement par stimulation electrique

Une fois le bilan ORL complet réalisé, comportant une IRM, une audiomètrie et des potentiels évoqués auditifs, dans le cadre d’acouphènes idiopathiques (sans cause retrouvée), on pourra recourir :

-       A des traitements médicaux

vasodilatateurs, anxiolytiques, et /ou antidépresseurs, certains antiépileptiques

-       aux thérapies cognitivo-comportementales (TCC)

le soutien psychiatrique (dont la thérapie de groupe, consultation de la douleur, la sophrologie ; l’hypnose. les techniques de relaxation.

-       La Méthode Tomatis : rééducation de l’écoute utilisant du son transmis par voie aérienne et par voie osseuse, parfois efficace.

-       Chirurgie :

-       * mise en place d’un aérateur trans-tympanique (yoyo), pour réduire la pression dans la caisse du tympan

·         stimulation du nerf vague, couplée à une thérapie sonore

·         sub-luxation de l’articulation temporo-maxillaire : SADAM

Certains acouphènes sont directement liés à une sub-luxation de la mandibule avec ressaut- claquement de la mâchoire. Un ORL ou un stomatologue, pourra remettre le condyle de la mâchoire en place et ainsi tenter de réduire l’intensité des acouphènes.

En effet, certains acouphènes sont dus à un dysfonctionnement de l’occlusion dentaire : les dents de la mâchoire supérieure ne « s’emboîtent » pas correctement avec les dents de la mâchoire inférieure. Cela se répercute sur l’articulation temporo-mandibulaire ainsi que sur l’équilibre ostéopathique des plaques osseuses crâniennes. Une manœuvre ostéopathique peut parfois être utile.

 

-       La stimulation électromagnétique corticale des aires auditives (ou TMS, abréviation de l'anglais Transcranial Magnetic Stimulation) par MDWave

Comme pour un stimulateur cardiaque (« pacemaker »), le neurostimulateur fournit une stimulation électrique, mais cette fois au niveau du cerveau. Cette stimulation électrique chronique permettrait de diminuer, voire de supprimer l’acouphène en stoppant l’hyperactivité pathologique du cortex auditif (action neuromodulatrice).

Rappels électro-physiologiques

L’audition est basée sur la perception corticale du courant bioélectrique (transformation dans la cochlée des vibrations acoustiques en décharges électriques nerveuses). L’acouphène peut être considéré comme la perception anormale d’une activité électrique biologique naissant quelque part sur les voies auditives. La stimulation électrique a pour but de soulager cette perception anormale par le patient.

 

Elle est proposée pour le traitement des acouphènes subjectifs chroniques invalidants résistant aux thérapeutiques usuelles, Chez les patients ayant un acouphène et un déficit auditif, il existe dans 50% des cas une hyperacousie associée (sensibilité anormale aux sons de la vie courante) qui serait d’origine centrale. Cela pourrait s’expliquer par le fait qu’après une perte auditive, il existerait un phénomène de neuroplasticité dans les centres auditifs, une réorganisation de la physiologie des aires corticales auditives.

 

Aprés repérage par IRM (Imagerie par Résonnance magnétique),elle consiste à appliquer une impulsion magnétique sur le cerveau à travers le crâne de façon indolore en plaçant une bobine à la surface de la tête.On crée un champ magnétique variable en faisant passer un courant électrique alternatif bien contrôlé dans une bobine de fil de cuivre dans une gaine isolante. Lorsqu’on le place près de la tête, le champ déclenche une activité électrique dans le cortex. Les courants à basse fréquence (< 1 Hz) réduisent l’activité et les courants à haute fréquence l’augmentent. Grâce au passage d'un courant électrique dans une "bobine" placée sur le scalp, on crée un champ magnétique orienté perpendiculairement au courant ; ce champ magnétique induit à son tour dans les tissus adjacents un courant électrique parallèle - mais de direction opposée - au courant de stimulation. En d'autres termes la SMT est finalement une stimulation électrique, mais obtenue sans électrodes et n'ayant pas d'effets indésirables majeurs.

 

Ces champs magnétiques induisent un champ électrique qui modifie donc l'activité des neurones situés dans le champ magnétique de la SMT. Une utilisation courante de la SMT est la stimulation dite répétitive (SMT) consiste à émettre une série d'impulsions pendant un intervalle de temps donné de façon à modifier sensiblement l'activité de la région visée.On peut contrôler l'intensité de la stimulation, la région cérébrale à stimuler, la fréquence des trains d'impulsions délivrées. Une fréquence inférieure à 1 Hz est supposée avoir un effet inhibiteur sur les neurones visés. Supérieure à 3 Hz, elle serait excitatrice

 

Il est bien établi actuellement que les acouphènes chroniques sont associées à l’augmentation de l’activité du cortex temporo-pariétal. La modulation de cette activité aberrante par des stimulations magnétiques transcrâniennes répétitives (SMT) peut contribuer au traitement des acouphènes qui résistent aux traitements classiques. Depuis 2003, les chercheurs européens ont prouvé le potentiel thérapeutique de la SMT dans le traitement des acouphènes chroniques. Les recherches dans ce domaine continuent activement afin d’ augmenter l’efficacité des protocoles thérapeutiques.La SMT utilisée à basse fréquence sur le cortex auditif primaire gauche permet de traiter ce trouble d’hyperexcitabilité et de réduire ou soulager les acouphènes.Il faut au moins deux traitements par jour d’une demi-heure à une heure pendant cinq jours pour ressentir les effets bénéfiques du traitement. Le traitement de l’acouphène est extrêmement ciblé.

 

Des données expérimentales chez l’animal, des études en magnéto-encéphalographie chez l’homme, des études en IRM fonctionnelle et en métabolisme PET montrent qu’il y a une corrélation entre l’intensité subjective de l’acouphène et l’importance de la réorganisation du cortex auditif comparable à ce qui est observé dans les douleurs chroniques liées à la diminution ou la perte d’informations en provenance de la périphérie. Il existe donc une parenté physiopathologique (de mécanisme) entre les deux phénomènes. Or, depuis une vingtaine d’années des techniques de stimulation du cortex cérébral ont été développées pour lutter contre ces douleurs chroniques, mais également contreles dépressions sévères avec une efficacité encore transitoire.

 

Ainsi, quand le cerveau ne reçoit plus certaines informations sensitives suite à la section des voies de la sensibilité après un accident par exemple, il peut développer de véritables hallucinations sensitives douloureuses, dites encore douleurs fantômes (le terme médical étant douleurs de désafférentation) en l’absence de toute cause périphérique de douleurs. Ces douleurs ont la particularité d’être en général totalement résistantes aux médicaments anti-douleurs, même les plus puissants. La stimulation du cortex pré-central permet de brouiller l’activité corticale, de réduire ces douleurs et/ou leur pénibilité de façon souvent très significative.

 

L’acouphène peut être considéré comme une perception auditive fantôme par l’existence d’une lésion périphérique généralement cochléaire (baisse d’audition), l’hyperactivité des voies centrales (hyperacousie), l’absence de corrélation entre la lésion et la gêne mais aussi par l’importance du contexte psychologique (rôle de l’anxiété et de la dépression), l’échec habituel des traitements dits périphériques (comme les vasodilatateurs), l’activité relative des traitements dits centraux (anxiolytiques, antidépresseurs), l’efficacité partielle de la prise en charge psychothérapique (thérapie comportementale) et enfin par une certaine efficacité des stimulations électriques et sonores.

 

C’est pourquoi les thérapies de type neurostimulation représentent un espoir majeur pour la prise en charge des acouphènes. La stimulation peut alors concerner soit les voies auditives externes (stimulation électrique cutanée ou sonore), soit l’oreille moyenne (stimulation électrique du promontoire, petite saillie de la paroi entre oreille moyenne et oreille interne), soit l’oreille interne (implant cochléaire), soit le noyau cochléaire (premier relais central des voies auditives) par implant du tronc cérébral.

 

Il semble que plus la stimulation est appliquée à un niveau élevé des voies auditives, plus l’efficacité augmente, ce qui justifie des stimulations au niveau du cortex cérébral lui même : stimulation magnétique trans-crânienne répétitive ou bien stimulation électrique appliquée à la surface du cerveau sur la dure-mère (membrane qui protège le cerveau).

 

La méthodologie est tout à fait identique à la méthodologie de la stimulation corticale pour douleurs, seule change la position des électrodes sur le cerveau qui ne sont plus positionnées au niveau du cortex pré-central mais en regard des aires auditives. Certains auteurs proposent la stimulation systématique des aires auditives du côté gauche (dominant). Lorsque celui-ci est unilatéral, d’autres préfèrent proposer la stimulation des aires auditives du côté opposé à l’acouphène, du fait du croisement des voies auditives (les messages de l’oreille gauche sont traités par le cortex auditif de l’hémisphère droit et vice versa).

 

La proposition d’une stimulation électrique est en général formulée lorsque l’acouphène subjectif est d’origine périphérique (cochlée ou nerf auditif), invalidant, permanent et chronique depuis plus d’un an, qu’il a résisté aux principales thérapeutiques médicamenteuses et psychothérapiques habituelles et que son intensité est sévère (mesurée à plus de 6 sur 10 sur une échelle visuelle analogique). On s’accorde pour considérer que les meilleurs candidats à la stimulation, sont les patients n’ayant pas totalement perdu l’audition.

D’après les résultats de l’équipe de l’Hôpital La Timone à Marseille, il faut considérer grossièrement que les patients traités par ce type de méthode sont considérablement améliorés dans un tiers des cas, améliorés de façon modeste dans un tiers des cas, et ne perçoivent aucun bénéfice de cette thérapie dans le tiers restant.

Selon les résultats obtenus pas cette équipe, il ne faut pas espérer une suppression totale de l’acouphène mais au mieux une diminution importante de sa pénibilité. De plus larges séries de patients et des suivis plus prolongés restent totalement indispensables avant de se prononcer définitivement sur la qualité et la durée du bénéfice apportés aux patients.

 

Le THERABAND/AUDIMAX® de SHULMANN (1985) est un outil portable fournissant un courant alternatif de bas niveau dans les deux mastoïdes, en continu. Il utilise un balayage fréquentiel de 200 à 20 000 Hz. Utilisé au début une heure par jour, son utilisation passe rapidement à cinq heures par jour. Il observe une diminution des acouphènes dans 54 % des cas mais une augmentation dans 5 % des cas. Cependant, les études lui faisant suite ont largement revu à la baisse ces résultats.

 

La stimulation chronique du système auditif avec une prothèse implantable multi-canaux chez les patients souffrant d’acouphènes est limitée aux problèmes d’audition.

 

La stimulation électromagnétique trans-crânienne a donc pour but de diminuer l'hyperexcitabilité des voies auditives. Les résultats sont de deux types.

-       Ils peuvent être rapides si on a d’emblée accès à l’excitabilité des neurones.

-       ils sont parfois plus tardifs lorsque la stimulation entraîne une réorganisation au niveau du cortex auditif primaire, notamment dans la répartition fréquentielle, et au bout de quelque temps, il est possible que la réorganisation ne se fasse pas de la même manière. C’est pourquoi on attend en général trois mois avant de commencer un autre type de traitement. Il peut parfois exister des effets secondaires : des céphalées ou des accentuations des acouphènes, pendant une journée ou deux.

Références:

Mennemeier et al., 2008

Kleinjung et al., 2008

Londero et. al., 2006

Kleinjung et.al., 2006

Langguth et. al., 2006

 

Les recherches en France ont reçu l’accord d’un Comité d’Éthique Biomédicale (Comité de Protection des Personnes de Lyon) et de l’Agence Française de Sécurité Sanitaire des Produits de Santé et le soutien du Conseil d’Administration de France Acouphènes.